2.12.05

Lettre ouverte aux scénaristes en devenir

Ma vie est en train de changer. Résolument.
C’est même ce qu’on pourrait appeler une nouvelle vie. Alors, à l’aube de cette révolution, je m’arrête un instant pour me retourner sur les années passées.
Plus de vingt ans déjà que j’ai fait ce choix de travailler comme scénariste et réalisateur, pour le cinéma bien sûr, mais aussi pour la télévision. Vingt ans que je propose des projets, que je rencontre des producteurs, des diffuseurs, des collaborateurs. Vingt ans de rencontres, les unes magnifiques, les autres douloureuses. Vingt ans au cours desquels peu de choses auront finalement abouti, mais dont je suis quand même très fier. Vingt ans enfin que je doute, tant il est vrai que chaque échec est l’occasion d’une remise en question. Enfin, je devrais dire « était l’occasion». Car aujourd’hui le vrai changement, la révolution, se situe bien là.
Est-ce l’arrivée dans quelques jours d’un enfant qui m’oblige à me projeter dans l’avenir avec optimisme et enthousiasme ? Sont-ce les belles rencontres que j’ai faites depuis un an, après avoir décidé d’arrêter de tourner autour du pot et de mettre toute mon énergie dans l’écriture ?
Toujours est-il qu’aujourd’hui, je ne vois plus les choses de la même façon. Avant, je pensais que c’étaient les autres qui avaient raison lorsqu’ils pointaient les faiblesses de mes projets, voire de mon talent.
Aujourd’hui, je sais qu’ils ont tort. J’ai confiance en mon talent, et mieux, je sais qu’il s’est renforcé au fil des années et du travail. Et mieux encore, je sais qu’il va croître dans l’avenir, trouver de plus en plus son plein essor.
Dans mes pires moments de doute, j’ai attendu des signes, un message qui descendrait du ciel pour me convaincre que j’avais raison de m’acharner. Il suffisait que je déambule dans Paris, ces idées noires en tête, et que je tombe par hasard sur le tournage d’un film, avec ses lumières et ses acteurs maquillés, pour que je retrouve le sourire, convaincu que quelqu’un ou quelque chose s’adressait à moi pour m’encourager…
Aujourd’hui, je ne crois plus en ces signes et je ne les cherche plus. Tout simplement parce que j’ai réalisé qu’ils sont en moi depuis toujours. Je suis né avec, et il suffisait que j’ouvre les yeux…
Alors, même si j’ai bien conscience aujourd’hui que je ne suis pas forcément un génie, je sais aussi que personne ne pourra me convaincre que je n’ai pas de talent. Et à un scénariste qui me dirait qu’il se donne encore six mois pour réussir à faire triompher ses projets, je répondrais que s’il se donne une limite, s’il hésite, c’est sans doute que sa motivation n’est pas si grande que cela.
En fait, j’ai parlé de choix au début de ces lignes, choix de vie et de destin. Il n’en est rien.
Je n’ai pas choisi ce métier, c’est lui qui m’a choisi. Plus on avance en âge, et plus on devient ce que l’on est.
Quand j’avais 20 ans, je me donnais jusqu’à 30 ans pour réussir. A 30 ans, je me donnais jusqu’à 35. A 35, jusqu’à 40…
Aujourd’hui, j’ai cessé ce petit jeu. J’ai trouvé la paix, parce que j’assume ce que je suis, qui je suis. Une sorte de coming out.
Parce qu’écrire des histoires, inventer des personnages et leur donner vie, n’est pas pour moi une activité optionnelle, un épiphénomène. C’est ma raison d’être, le sens de ma vie, l’essence même de mon moi profond, ce qui me tient debout. Je n’ai pas seulement « envie » de le faire, j’existe « en train » de le faire.
Si j’abandonnais, j’abandonnerais la vie.
J’en ai croisé des gens qui semblaient avoir la même motivation et qui finalement ont déclaré forfait. Aujourd’hui ils tiennent un magasin ou donnent des cours dans des établissements. Je ne juge pas cela. Simplement, ce n’est pas qu’ils ont abandonné leur projet de vie. C’est plutôt que ce n’était pas ça, leur projet de vie.
Quant à moi, rien ni personne ne me fera renoncer. S’il faut une vie, j’y passerai ma vie. S’il faut encore une autre vie, je reviendrai…
J’ai mis 37 ans à rencontrer la femme de ma vie, celle-là même qui dans quelques jours mettra au monde notre premier enfant.
J’ai mis 42 ans à rencontrer un partenaire d’écriture, avec lequel mes projets ont soudain pris une réelle envolée.
Je ne crois en aucun Dieu, en aucun signe. Je crois juste à la force du travail, de l’abnégation, de l’acharnement, de la passion, de l’amour…
Parce qu’on a une vie à vivre et qu’il faut se demander, profondément, ce qu’on veut en faire, et ce qu’on est prêt à sacrifier pour qu’elle ressemble à ce rêve d’enfant qui un jour s’est planté en nous comme une graine, un petit diamant brut qu’il faut sans cesse polir…
Tom arrive, des producteurs nous font confiance, estiment qu’ils ont fait une belle rencontre en croisant notre chemin. Nous avons des idées plein la tête, l’énergie d’un esprit sain dans un corps sain. L’avenir nous ouvre les bras. Mais ce qui reste vrai, au-delà de tout ça, c’est que cette vie-là, à venir, c’est à nous de l’inventer.

12 commentaires:

Jule a dit…

Toujours cette plume magique qui me tirerait presque les larmes des yeux.

Tes textes sont comme tous ces films qui nous refilent le sourire parce que tout s'y passe bien. Parce que les héros sont gentils, triomphent et finissent leurs jours avec la belle de service. J'hésite à présent à sortir mon couplet rabat joie, nous rappellant que si la théorie est belle, la pratique l'est parfois nettement moins, mais ce serait sans doute, finir sur une touche négative qui nous filerait tous le bourdon.

Alors je suis d'accord avec toi. Pour trancher entre ton article et celui de la personne à qui j'ai cru comprendre qu'il était particulièrement destiné, je dirai que tenter de compartimenter la vie en s'accordant des périodes, façon Picasso, est une grossière erreur.

Je pense que les fondements de notre existence, que la base de toute notre histoire est gravée dans le marbre. On peu essayer différent chemins mais on arrive toujours la ou on doit arriver. Qui a déjà réussit à faire un labyrinthe dans Télé7Jeux sans utiliser une seule fois sa gomme?? Qui??

Je suis pour ma part en train d'écumer les unes après les autres, toutes les solutions pour faire ce que j'aime. Les plus évidentes s'étant soldées par des échecs cuisant, je vais tenter autre chose. Le plan B.

Un plan B qui n'est pas forcément le plus simple ni le plus agréable mais qui me permettra d'arriver la ou je veux aller.

j_christ a dit…

Mon cher Jule,
Je ne vois pas ce qu'il y a d'idyllique dans mes propos. ils sont simplement l'expression de mon expérience personnelle et je t'assure que tout n'était pas si rose que cela...
Je dis simplement que c'est toi qui, en très grande partie, fait de ta vie ce qu'elle sera.

Jule a dit…

Il n'y a rien d'idyllique dans tes propos, simplement tout parait simple quand tu l'écris.
J'ai précisé être assez d'accord avec toi. Chacun mène sa vie et arrive la ou il s'est lui même emmené, le chemin est juste parfois semé d'embuches...

j_christ a dit…

Pas de doute, t'as retrouvé la patate toi!

j_christ a dit…

Officiellement, Séquence 7.

Seq7 pour les intimes.

;)

Jule a dit…

Vous êtes du KGB tous les deux? C'est des messages codés c'est ça?

Anonyme a dit…

Rien à voir, mais alors rien à voir avec le post.
Mais je viens d'entendre la nouvelle chanson de Nolwenn, et pour la première fois, j'aime ce qu'elle fait.
Et toi, fan de la première heure?

j_christ a dit…

Mais oui, mais oui !

Enfin quelqu'un qui me comprend...

j_christ a dit…

Pas de doute, t'as VRAIMENT retrouvé la patate...

Anonyme a dit…

Hé le relou (Cedric), j'ai le droit de partager mon goût pour la nouvelle chanson de Nolwenn Leroy avec Monsieur JC. Si j'étais une intime, je pourrais lui en parler par mail, mais ce n'est pas le cas, alors le blog reste le meilleur endroit. Non mais.
Et qu'est-ce que ça vient faire là Porcupine de mes §*£!!§** ?

Jule a dit…

Pfff putain...
J'hesite entre pleurer ou pleurer :(

Cédric, espèce de grosse buse !

Jule a dit…

Hey ! Qui a refoutu de l'huile sur le feu?

hein?