
Après la réunion avec le diffuseur, qui a rejeté la majorité des partis pris souhaités par la production, nous avons donc été écartés de la série. Un auteur va reprendre notre séquencier pour en faire une V8, et passer à la CD, si tout va bien.
Au-delà de la déception, sur le fond, la forme et le manque à gagner, je m'interroge.
Quand je lis par exemple
le blog de l'apprenti, où il explique en gros qu'il préfère ne pas écrire pour la télévision française parce qu'il sent que ses projets n'y trouveraient par leur place, et que le goût du public ne correspond pas à ce qu'il a envie de leur proposer, j'avoue que cela me fait me poser des questions. Faut-il absolument se forcer à écrire pour gagner sa vie, quitte à vivre au quotidien la déception et la frustration, ou vaut-il mieux conserver son intégrité en attendant des jours meilleurs, et trouver un autre moyen de gagner de l'argent ?
Oui, mais quel autre moyen ? J'ai fait l'assistant-réalisateur pendant de longues années, je n'en ai plus envie, et je ne me vois pas vendre des big mac, en tout cas plus à mon âge. Et puis si on ne fait qu'attendre d'écrire au lieu d'écrire, est-on vraiment scénariste ? Bref, n'est-ce pas une posture un peu facile ? Car l'apprenti, par définition, est un apprenti, et il ne s'est donc jamais frotté au principe de réalité, celui d'un système, avec ses lois, ses contraintes, ses intervenants. Il n'y a aucun mal à renoncer à être scénariste de télévision, mais alors il faut passer à autre chose. Finalement, je préfère me dire qu'il doit y avoir un moyen de combattre de l'intérieur. À force de croiser des gens et après quelques mauvaises rencontres, on finit par trouver ceux avec qui ça peut coller
Le meilleur exemple, GDM. La preuve que l'alchimie entre un producteur talentueux et intelligent, des auteurs motivés et un diffuseur qui a l'air de suivre, cela peut exister.
Bon, comme rien n'est simple, c'est sur le service public, avec les risques de démantèlements qui se font plus précis de jours en jours…
Je disais qu'il fallait avoir la foi, je le pense de plus en plus. Une foi qui doit s'accompagner d'un combat, de risques à prendre, jusqu'au sacrifice, sans doute, de sa personne.
Après tout, Jésus-Christ n'a pas très bien fini.
En attendant, comme disait ma grand-mère, il faut porter sa croix…